Résumé :
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La diversité génétique est désormais considérée comme une dimension clé de la biodiversité. Bien qu'elle ait été utilisée et valorisée depuis longtemps par les généticiens forestiers pour créer des variétés plus performantes, elle demeure encore marginale dans les programmes de conservation de la biodiversité forestière et de gestion durable. Ayant désormais à faire face à des environnements évoluant très rapidement, les populations d'arbres forestiers peuvent tirer profit de leur niveau élevé de diversité intraspécifique. Elles peuvent ainsi produire une grande quantité de génotypes d'une génération à l'autre et s'adapter plus facilement à des conditions écologiques variables. La diversité génétique présente chez les arbres forestiers contribue également à la diversité interspécifique et à celle des communautés liées à ces espèces clé de voûte. La régénération constitue une étape déterminante dans la transmission du pool génétique d'une génération à l'autre. La quantité et la qualité (autofécondation, hétérozygotie, introgression) de la production de graines dépendent non seulement de facteurs externes, comme le sol ou le climat, mais aussi des caractéristiques du peuplement semencier. Un peuplement est caractérisé par sa composition génétique mais aussi par sa composition interspécifique et la répartition spatiale de ses tiges reproductrices. Les conséquences génétiques des variations temporelles et spatiales de fertilité sont désormais bien connues chez de nombreuses espèces forestières. Le régime de reproduction de chaque espèce composant ce peuplement est fortement influencé par les potentiels florifères et fructifères, la densité locale et la position des arbres adultes. Les interactions entre ces différents facteurs vont fianlement produire les croisements entre tiges fructifères qui vont contribuer à constituer le futur pool génétique. Les progrès récents et considérables dans le domaine des marqueurs moléculaires offrent aujourd'hui l'opportunité d'étudier en détail les flux de gènes à l'intérieur d'un peuplement mais aussi entre peuplements proches. Toutefois, l'impact de la structure spatiale d'un peuplement reproduteur sur les flux de gènes et le régime de reproduction mérite encore d'être précisé en raison des particularités biologiques des différentes essences forestières et de la diversité des situations de terrain (densités, composition en espèces, niveau de fragmentation). Le renouvellement d'un peuplement suppose des choix techniques et économiques. Dans le cadre d'une régénération naturelle, la qualité génétique des semences produites et leur capacité de dispersion efficace vont sensiblement influencer le niveau et la structure spatiale de la diversité génétique du futur peuplement. L'histoire passée et l'origine du peuplement à régénérer doivent également être prises en compte avant de choisir un tel mode de renouvellement. Une régénération artificielle par plantation ou semis devra quant à elle maîtriser la qualité génétique des MFR utilisés, cette dernière étant fortement influencée par les méthodes de récolte des semences et les techniques de production de plants. Enfin, la mise en place d'une mémoire fiable de l'origine génétique des peuplements forestiers devient un enjeu majeur pour la conservation des ressources génétiques et pour mieux comprendre les réactions des boisements à des contraintes biotiques ou abiotiques. Modes de traitements, types de sylviculture et types de MFR constituent les choix techniques majeurs des gestionnaires. On pourrait donc s'attendre à ce que les conséquences génétiques de divers modes de traitements soient fortement documentées pour les principales essences forestières. Il n'en est hélas rien et seules quelques rares études comparatives évaluent la diversité génétique de peuplements de sapin ou de hêtre conduits en futaie régulière ou irrégulière. Cependant les nombreuses études récentes menées sur les flux de gènes en relation avec la répartition spatiale des tiges reproductrices peuvent désormais apporter un éclairage utile sur les conséquences génétiques de modes de traitement qui influent directement sur cette répartition spatiale. L'analyse des flux de gènes est toutefois généralement menée à une échelle très locale, égale ou inférieure à celle d'une unité de gestion et n'inclut que très exceptionnellement les flux de gènes à plus longue distance entre peuplements voisins. L'importance génétique de tels flux de gènes a pourtant été démontrée. De même, la gestion raisonnée des ressources génétiques de peuplements mélangés est très peu documentée alors que nombreuses sont les politiques forestières incitant au développement de tels types de peuplements. De nombreuses lacunes de connaissance persistent donc dans ces domaines ; elles mériteraient d'être comblées en synergie avec des travaux portant sur les diversités interspécifique et écosystémique. Les conséquences génétiques de travaux préparatoires à une régénération naturelle ou de sélections précoces de tiges demeurent elles aussi très peu connues alors que l'impact des éclaircies sylvicoles est mieux documenté pour plusieurs essences sociales majeures, même si les résultats disponibles apparaissent difficilement extrapolables en routine. En outre, du fait de la longue durée d'un cycle sylvicole complet et du développement récent des marqueurs moléculaires, on ne dispose pas actuellement de suivis de peuplements forestiers associant sur du long terme démarches génétique et sylvicole.
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