Résumé :
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En zone fromagère AOP de montagne, le foin constitue une part importante de la ration hivernale des vaches laitières. Il provient essentiellement de prairies composées de plusieurs familles botaniques et espèces végétales. Les éleveurs sont donc dépendants de la quantité et de la valeur alimentaire du foin produit. Dans les tables INRA, les composantes biochimiques sont utilisées pour prévoir la valeur alimentaire du foin. Ces modèles de prévision ont été établis à partir de données collectées principalement dans les années 1960 – 1970. Depuis cette période, les évolutions climatiques et technologiques ont pu modifier la relation entre les composantes biochimiques et la valeur alimentaire du foin mesurée sur les animaux. La difficulté à prévoir la réponse de production des vaches alimentées avec des rations à base de foin fait suspecter aux acteurs de la filière élevage un décalage entre la valeur alimentaire des fourrages de référence des tables INRA et celles des foins récoltés sur le terrain. Ceux-ci s’interrogent en particulier sur le rôle de la teneur en glucides solubles totaux (GLST) qui est très variable et qui n’est pas prise en compte actuellement dans la prévision de la valeur alimentaire des fourrages. L’utilisation de la composition botanique de la prairie, voire d’autres critères agroclimatiques, en plus des composantes biochimiques pourraient également améliorer la prévision de la valeur alimentaire. Cette thèse avait pour objectifs 1/ d’identifier et de quantifier l’effet des déterminants sur la valeur alimentaire des foins de prairies multiespèces et 2/ d’améliorer la prévision de la valeur alimentaire des foins de prairies multiespèces, afin d’améliorer la prévision des réponses zootechniques. A partir de l’analyse rétrospective des mesures in vivo sur des ovins réalisées pendant 32 années à l’INRA de Marcenat (15), nous avons montré l’effet indirect de la hausse des températures de l’air sur la valeur alimentaire (digestibilité : dMO ; ingestibilité : MSVI) de foins de prairies multiespèces. Ces évolutions expliqueraient en partie les décalages observés entre la valeur alimentaire des tables INRA et des valeurs mesurées aujourd’hui en pratique. Entre 2015 et 2017, 32 foins de prairies multiespèces ont été récoltés dans trois zones de demi-montagne (Massif Central, Jura, Préalpes Suisse) selon plusieurs facteurs de variation. La dMO et la MSVI de ces 32 foins ont été mesurées sur des ovins et des génisses et la dégradabilité théorique de l’azote (DTN) sur des vaches. Ces nouvelles références de valeur alimentaire ont permis de tester les équations de prévision actuellement disponibles en pratique, et de chercher à en établir de nouvelles. Les équations actuelles prévoient bien la dMO, mais pas la DTN. De plus, elles sous-estiment systématiquement la MSVI mesurée, sans doute en partie en raison d’une plus forte capacité d’ingestion des animaux utilisés aujourd’hui. L’utilisation du taux de GLST améliore la prévision de la DTN. Cette composante chimique a également permis d’expliquer une part de variabilité de la MSVI inexpliquée par les composantes biochimiques utilisées classiquement. La composition botanique n’a pas amélioré la prévision de la valeur alimentaire, tandis que la somme des températures de l’air à la fauche serait un critère prometteur pour améliorer la prévision de la DTN, et dans une moindre mesure de la dMO. Dans un essai sur vaches laitières en production, les vaches alimentées avec un foin riche en GLST ont produit davantage de lait et de matière utile que celles alimentées avec un foin pauvre en GLST. Ces résultats proviendraient en premier d’une plus forte dMO du foin riche en GLST et d’une ingestion plus élevée avec la ration comprenant ce foin. Ces nouvelles références, ainsi que les équations établies pendant cette thèse, pourront servir de base pour la mise à jour des équations de prévision de la valeur alimentaire des fourrages issus de prairies multiespèces dans les tables INRA.
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