Résumé :
|
Dans le contexte actuel d’allongement de l’espérance de vie, la prévalence des maladies liées à l’âge telles que l’ostéoporose est de plus en plus importante. Le coût de la prise en charge de ces pathologies constitue un problème de santé public majeur et la mise en place de stratégies de prévention nutritionnelle adaptées apparaît comme une excellente solution alternative aux traitements habituels. Pourtant, l’étude des activités biologiques des nutriments reste trop marginale pour certains tissus et certaines catégories de molécules, c’est notamment le cas du tissu osseux et des lipides, en particulier les acides gras.Ces derniers sont pourtant capables de moduler le devenir du tissu osseux que ce soit indirectement par des mécanismes systémiques ou directement au niveau de la cellule osseuse. La perte osseuse liée au vieillissement est souvent associée à l’établissement progressif d’une inflammation chronique à bas bruit à l’échelle de l’organisme. Dans ce contexte, les niveaux de cytokines pro-inflammatoires telles que l’interleukine 6 ou le Tumor Necrosis Factor α sont augmentés et ces composés, qui sont connus pour induire la résorption osseuse, pourraient contribuer à la dégradation du squelette. Notre hypothèse de travail était que certains Acides Gras Poly-Insaturés (AGPI) à propriétés anti-inflammatoires pouvaient éventuellement limiter l’inflammation chronique associée au vieillissement et ainsi contribuer à préserver le capital osseux. Dans cette optique, nous avons utilisé la souris SamP8 qui est un modèle de progeria présentant, à douze mois, un phénotype ostéoporotique. Dans ce modèle, l’administration d’un régime délétère à base d’huile de tournesol (ratio acide gras ω6 /ω3 très important) aggrave la perte osseuse en association avec une augmentation des marqueurs inflammatoires systémiques et osseux ainsi qu’une augmentation des marqueurs de la résorption osseuse. La supplémentation de ce régime tournesol avec de l’huile de bourrache ou de l’huile de poisson permet d’apporter des quantités importantes d’AGPI anti-inflammatoires (acide γ-linoléique pour l’huile de bourrache et ω3 pour l’huile de poisson). De manière intéressante, ces deux régimes supplémentés permettent, en plus de réduire les paramètres inflammatoires, de s’opposer à l’augmentation des marqueurs de résorption osseuse et de limiter la diminution de la densité minérale de l’os chez ces souris. Cette étude met donc en évidence le potentiel santé de certains AGPI au regard de la préservation du capital osseux et suggère un rôle déterminant de leurs propriétés anti-inflammatoires systémiques. En parallèle, la description des effets directs des acides gras au niveau cellulaire par l’activation de récepteurs spécifiques occupent une place croissante dans la littérature. Récemment, le récepteur membranaire GPR40 (G Protein coupled Receptor 40) a été mis en évidence pour ses interactions avec les acides gras libres à longues chaînes et nous avons pu montrer son expression dans les précurseurs ostéoclastiques. Nous avons donc émis l’hypothèse que ce récepteur pourrait jouer un rôle dans la médiation des effets des acides gras sur les paramètres du remodelage osseux. Ce travail a permis de mettre en évidence l’existence d’un phénotype ostéoporotique chez la souris invalidée pour le GPR40. L’effet protecteur de ce récepteur semble lié principalement à un effet inhibiteur de son activation sur la différenciation des ostéoclastes. En effet, l’utilisation de l’agoniste spécifique du GPR40 empêche in vitro la différenciation ostéoclastique par RANKL de deux modèles cellulaires de manière GPR40-dépendante. De surcroit, cet agoniste est également capable in vivo de s’opposer à une perte osseuse induite chez la souris. Ces résultats révèlent pour la première fois l’implication du récepteur GPR40 dans la physiologie osseuse et apportent la connaissance d’une nouvelle possibilité de modulation directe des cellules osseuses par les acides gras.
|