Résumé :
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La forêt de Saint-Antoine, située dans les Vosges saônoises, constitue probablement l'un des plus beaux massifs gérés par l'Office national des forêts aujourd'hui. Cette recherche scientifique vise à analyser conjointement les permanences et les mutations qui marquent le passage à un autre système de mise en valeur et d'approche d'un espace. Les deux termes sont en réalité intimement liés dans la mesure où ils résultent tous deux de la manière dont l'homme a conçu cette forêt au cours des âges. De cette conception évolutive découle une série d'enjeux qui ont déterminé le visage actuel du massif forestier de Saint-Antoine. L'étude des cadres administratifs et forestiers permet de saisir la diversité des institutions de l'Ancien Régime et ainsi de mieux comprendre les origines de ce massif. Cette originalité s'explique sans doute en raison de l'existence de pouvoirs concurrents dans une région vitale sur le plan stratégique. L'histoire de la forêt de Saint-Antoine se trouve émaillée de nombreux conflits, particulièrement sous l'Ancien Régime. Désormais, un nouvel intervenant émerge, la communauté villageoise qui, elle-aussi, réclame sa part au bois. La rupture intervient réellement au XVIIIe siècle lorsque les premières industries cherchent à se développer en ayant recours à la richesse locale qu'est le bois. La forêt devient alors l'objet de nombreux enjeux contradictoires qui manquent de la conduire à sa ruine dans la première moitié du XIXe siècle. Les pâturages enclavés au beau milieu de l'espace boisé mettent en valeur l'importance du système agro-sylvo-pastoral pour la région. Une fois de plus cette richesse suscite les appétits des uns et des autres. Dans une région aux sols pauvres où la population ne cesse de croître, la possession de tels pâturages constitue un enjeu majeur que les événements révolutionnaires mettent en lumière. Mais ces prairies plantées dans la forêt représentent aussi un danger permanent pour l'arbre. La période contemporaine (XIX' et début du XX' siècle) est marquée par un vaste mouvement de reprise en main de la part de l'institution forestière chargée de rétablir la forêt. De nouveaux impératifs apparaissent : aménager la forêt et la mettre en valeur économiquement. Le massif de Saint-Antoine doit une fois de plus vivre avec son temps et s'adapter à une nouvelle ère, celle de l'industrie. Au même moment semble poindre cependant un certain intérêt pour la nature. La forêt ne serait-elle plus seulement un objet économique mais aussi un espace de loisirs et d'identité ?
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