Résumé :
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Les systèmes de reproduction jouent un rôle fondamental dans la structuration spatio-temporelle de la diversité génétique des espèces. Cette thèse, portant sur l'étude de trois populations de merisiers, a pour but de mieux comprendre les implications évolutives d'un système de reproduction mixte chez les plantes combinant à la fois une propagation asexuée et une reproduction sexuée contrôlée par un système d'auto-incompatibilité gamétophytique (GSI). Nous avons étudié les influences de la propagation asexuée et du GSI sur (1) la structuration diversité génétique intra et inter populations et sur (2) l'efficacité de sa transmission d'une génération à l'autre. Confrontant des modèles et concepts théoriques aux réalités biologiques, nos résultats démontrent à la fois un effet de l'asexualité et du GSI sur l'évolution de la diversité génétique de notre espèce. Ces effets sont plus complexes voire contraires à ce que prédisent les modèles ou les concepts actuellement admis. Les systèmes de reproduction jouent un rôle fondamental dans la structuration spatiale et temporelle de la diversité génétique au sein et entre les populations d'une même espèce. Chez les plantes, de nombreuses espèces présentent en population la capacité de se propager partiellement par voie asexuée et de se reproduire par voie sexuée sous contrôle d'un système d'auto-incompatibilité gamétophytique (GSI). Cette thèse a pour but de mieux comprendre les implications évolutives de l'utilisation de systèmes de reproduction mixtes chez les plantes qui combinent à la fois un mode de propagation asexuée facultative et une reproduction sexuée où les croisements se font sous le contrôle d'un système d'auto-incompatibilité. Tout d'abord, nous nous sommes intéressé à l'impact de la propagation asexuée et du GSI sur la diversité génétique et sa structuration en populations. Nos résultats montrent que la prise en compte des répétitions des génotypes dues à la propagation asexuée diminue les valeurs de FIs, non pas que les génotypes clonaux aient une hétérozygotie plus élevée mais parce qu'ils augmentent les fréquences des allèles qu'ils portent le plus souvent et relativisent les fréquences des autres. En conséquence, les valeurs de l'hétérozygotie attendue diminuent alors que l'hétérozygotie observée reste la même. Cependant, d'une population à l'autre, les génotypes ne portent pas les mêmes allèles. Par conséquent, la prise en compte des répétitions de génotypes dues à la propagation asexuée augmente la différenciation inter-populations. Par ailleurs, nos données constituent un premier élément de confirmation de l'effet d'un locus du GSI sur des loci neutres liés et non liés, prédit par le modèle théorique de Glémin et al. (2001). Un locus à 2 cM du locus des GSI, un marqueur neutre présente des valeurs de diversité et de différenciation proches de celles rencontrées au locus du GSI, contrairement à d'autres loci non liés ou plus distants du GSI. Le GSI constitue un des modèles les plus étudiés pour étudier l'effet de la sélection balancée. En populations structurées, cette pression de sélection permet aux allèles S une meilleure mobilité en réduisant les effets de dérive. Cependant, le merisier possède une différenciation inter-populations médiane. Nos données empiriques soutiennent le modèle de Schierup (1998), montrant que pour des valeurs de différenciation médiane, la migration n'est pas suffisamment forte pour homogénéiser la diversité génétique des dèmes. Elle maintient de l'endémisme mais elle est, par ailleurs, suffisamment importante pour que ces allèles «endémiques» passent dans d'autres dèmes où on peut les y observer à des fréquences alléliques plus faibles que les valeurs d'équilibre attendues sous les hypothèses de Wright (1939). Dans une deuxième partie, nous nous sommes intéressé à l'étude de la transmission de cette diversité génétique d'une génération à l'autre par voie sexuée. Globalement chez cette espèce, peu de fleurs sont pollinisées en fruits. Par ailleurs, les participations individuelles à la création des générations suivantes sont inégales. Nos résultats montrent que la propagation asexuée n'est globalement pas un handicap pour la reproduction sexuée, elle favorise même la composante mâle des succès reproducteurs. Cependant, nous avons mis en évidence un effet de pollen limitation lorsque un génotype augmente le nombre de ramets du même genet dans son voisinage. Enfin, chose surprenante, nous n'observons pas d'effet de la sélection balancée sur la création de descendants. Les systèmes de reproduction alliés à une répartition spatiale qui apparaît fortement structurée semblent favoriser l'occurrence de croisements préférentiels réalisés le plus souvent entre individus spatialement proches. Cependant, une partie plus faible mais non négligeable des descendants est issue de croisements à plus longue distance. En confrontant des modèles et des concepts théoriques aux réalités biologiques, nos résultats mettent en évidence que les stratégies de reproduction participent à façonner l'évolution de la diversité génétique d'une espèce ; mais ils montrent aussi que leurs effets sont probablement plus complexes voire contraires à ce que prédisent les modèles ou les concepts actuellement admis. Comprendre les effets seuls ou combinés des stratégies de reproduction nécessitera des efforts plus soutenus de la part de la communauté scientifique.
Mating systems hold key parameters co understand the evolutionary processes shaping both the genetic diversity and differentiation. Most plants can propagate through both vegetative and sexual reproduction under gametophytic self-incompatibility systems (GSI). The aim of our study was to improve the understanding of the impact of the two reproductive strategies on both genetic diversity and differentiation through time. We studied the impact of asexual propagation and GSI on the population genetic differentiation. When clones are taken into account, heterozygote excess within populations increased. Genotypes that propagate asexually were not more heterozygous but the frequencies of the alleles preferentially shared by asexual genotypes increased while the frequencies of the alleles poorly shared by those ones decreased. Consequently, the expected heterozygosity decreased whereas the Fis values decreased Fis values. However, asexual genotypes did not share the same alleles among populations and thus genotypes incrcased the genetic differentiation among populations. Besides, our data confirmed the Glemin et al's predictions (2001) : at 2cM, a neutral locus closely linked to the GSI's one prescnted evidences of hitchhiking. As the GSI locus, the neutral locus exhibited high heterozygote excess and low differentiation among populations. The GSI constitutes an interesting tool to study the effect of the negative frequency dependent selection on genetic diversity and its structure. This kind of selection reduces the effect of the genetic drift and favours the allele mobility. However, the differentiation among population of wild cherry trees is intermediate. Our data validated the Schierup's predictions (1998). At an intermediate migration rate and contrary to the predictions of Wright model (1939), the S allele frequencies is dominated by low frequency alleles with large variance within demes. Low migration rate can maintain endemic specificities but is sufficiently high to propagate those specificities into other demes. In the second part of the manuscript, we studied how genetic diversity passes from one generation to another under sexual reproductions. First, very few flowers were pollinated successfully and produced fruits. Moreover, individuals variably participated the next generation. Our results showed that asexual propagation did not disadvantage sexual reproduction. However, pollen limitation can be detected when the neighbourhood of an asexual genotype is principally constituted of its own ramets. Besides, we did not detect any effect of balanced selection into sexual reproduction. The mating systems and the probably strong spatial structure cooperated to favour crosses between the closest neighbours. However, we observed a non-trivial quantity of progeny coming from long distance crosses. Our empirical data underlined the necessity to improve our knowledge on the impact of mixed mating systems have on evolutionary processes. Not only our results showed that their effects arc more complicated and even opposite to theoretical predictions but also that the mating system can play a major force that drives the evolution of the genetic diversity of species.
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