Résumé :
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La définition de la science, son organisation et les liens qui lunissent à la société font lobjet dâpres confrontations. Derrière les positions en présence se profilent des visions différentes du monde social et de ce quil devrait être. Depuis les années 1970, la science est la cible dattaques plus ou moins liées à la pensée postmoderne. Dabord localisé aux Etats-Unis, ce mouvement critique a gagné lEurope. Il accuse la science de contribuer à la domination de certaines minorités, daffirmer la supériorité de la science occidentale, de servir les complexes militaro-industriels et de concourir à la situation écologique déplorable de la planète. Une idéologie anti-science sest ainsi développée, suscitant lessor dun relativisme intellectuel pour lequel tout se vaut : la vérité nexisterait pas ; les démarcations classiques entre science et société, nature et culture sont niées et fondues dans un conglomérat indifférencié. Cette position conteste également à la science lautonomie quelle revendique pour fonctionner efficacement. Mais la revendication dune domestication démocratique de lactivité scientifique ne conduit-elle pas, dans le contexte actuel, à inscrire la science sous la coupe des lois du marché ? Une « guerre des sciences » est déclarée. Ce livre présente la toile de fond de ce débat en exposant trois points de vue sociologiques sur la science et linnovation technique. Le premier considère la science comme un mode de connaissance épistémologiquement différent des autres. À la suite de Robert K. Merton, des sociologues qui partagent cette approche ont analysé linstitutionnalisation des sciences, la formation de ses normes et de ses critères dexcellence professionnelle, les conditions du développement des connaissances et des révolutions scientifiques. Mais ils considèrent navoir rien à dire, en tant que sociologues, sur le contenu même de la science. Cette vision est remise en cause à la fin des années 1970 par une nouvelle sociologie qui dénie au savoir scientifique sa particularité. Poussant lanalyse au c½ur des structures cognitives de la science, elle prend pour objet la production scientifique elle-même. Selon ce point de vue, la science nexisterait ni en tant quespace social intégré ni en tant quensemble de disciplines distinctes, mais plutôt comme un « réseau ». La disjonction entre les deux perspectives laisse toute une série de problèmes en suspens. Nest-il pas envisageable de construire un cadre danalyse qui permettrait de saisir lautonomie relative du champ scientifique comme le résultat de forces transversales qui le traverseraient et le relieraient aux autres espaces sociaux ? C'est l'axe problématique qui conduit les auteurs à défendre la possibilité d'un troisième scénario dit transversaliste.
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