Résumé :
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À voir de plus en plus souvent des associations de riverains s'élever contre la réalisation de projets d'utilité publique ou des mouvements catégoriels freiner coûte que coûte l'adoption de mesures législatives qu'ils estiment attentatoires à leurs intérêts, on pourrait penser que le sens de l'intérêt général se délite. Naguère encore, il était admis que la définition de l'intérêt général incombe exclusivement à l'État et aux représentants élus de la nation. Mais cette croyance fondatrice de la modernité politique, qui a longtemps fonctionné en France comme un réflexe d'union républicaine, se trouve aujourd'hui ébranlée. Le pouvoir étatique s'exerce désormais dans un espace multipolaire où une pluralité d'acteurs infra-étatiques et supranationaux défendent leur propre lecture de l'intérêt général. De leur côté, les citoyens n'hésitent plus à contester les décisions de leurs représentants et à investir l'espace public pour faire valoir leurs demandes spécifiques. Dans un contexte de fort pluralisme, la formulation de l'intérêt général peut-elle encore être le monopole de l'État et de la représentation nationale ? Une conception procédurale de l'intérêt général n'a-t-elle pas émergé à mesure que se transformaient les modes de gouvernement ainsi que les sources de légitimité démocratique ?
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