Résumé :
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L'un des clichés les plus utilisés pour décrire l'évolution politique consiste à dénoncer le poids de la technocratie et son rôle dans la définition d'une pensée unique. Le cliché est fort car il est polyvalent et peut être utilisé sur plusieurs registres : celui de la fracture entre les élites et la nation, celui de l'incapacité de l'Etat à réformer la société ou même à la comprendre, celui des réseaux de solidarité qui unissent les hauts fonctionnaires contre le pouvoir politique. On n'en est donc pas à une contradiction près : les technocrates décident de tout mais restent impuissants devant les problèmes de société. Enfermés dans leur monde élitiste, ils font le jeu de la mondialisation. A l'argument populiste, il faut opposer l'analyse. Seize années d'alternances et de cohabitations ont changé la règle du jeu. Les hauts fonctionnaires sont politisés, les sommets de l'Etat se sont ouverts à la société civile et les militants ont pris le pas sur les technocrates. L'action de l'Etat n'est plus celle des années soixante : les groupes d'intérêt, les formes d'engagement et de contestation se sont multipliés. L'europe crée de nouvelles techniques de pouvoir. Le système politique est plus ouvert qu'il ne l'a jamais été. Plus que jamais, l'expertise est en procès. Le discours sur la technocratie cache l'incapacité des notables devant la pluralisation du débat et l'apparition de nouveaux modes de gouvernement.
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